Le contexte de la Covid-19 a eu des effets sur les marchés immobiliers, c’est indéniable. Le confinement, le télétravail, la fermeture des commerces, l’arrêt des voyages et plusieurs autres restrictions ont influencé bien des ménages quant à leur décision d’acheter ou de vendre leur propriété. Voici, à mon avis, quelques tendances à surveiller au cours de la prochaine année.
1. « L’exode rural » devrait ralentir
Si la pandémie a stimulé la demande dans les banlieues et les zones rurales, le retour à des habitudes de socialisation normales attirera à nouveau les acheteurs vers les centres-villes.
Les jeunes seront toujours attirés par les centres-villes. La possibilité de se déplacer à pied, l'accès aux restaurants et aux divertissements, et la diversité des différents quartiers redeviendront pour eux des priorités.
La tendance d’un déplacement des citadins vers les banlieues légèrement éloignées est régulière depuis plusieurs années, notamment en raison du prix élevé des résidences en ville. La crise sanitaire a accentué ce mouvement. Les acheteurs ne se sont toutefois plus contentés des banlieues, ils ont fait le saut en grand nombre jusqu’en milieu rural, ce qui est nouveau. Plusieurs familles qui avaient en tête de quitter la ville ont accéléré la réalisation de ce projet en raison du télétravail obligatoire et du confinement.
Nous observons actuellement une baisse de cet engouement des citadins pour les marchés immobiliers éloignés des grands centres. Cependant, les politiques de travail flexible, qui devraient laisser place au mode de travail hybride entre la maison et le bureau, vont faire réfléchir les acheteurs.
Selon moi, si plusieurs familles des grandes villes canadiennes continuent de s’installer à l’extérieur des villes, cette tendance devrait se stabiliser et ralentir lorsque la vie économique des centres-villes reprendra.
2. Les prix des propriétés pourraient continuer d’augmenter
Le nombre de transactions immobilières a atteint des sommets en 2020 1. C’est dans ce contexte de forte demande que l’on a constaté une hausse importante du coût moyen de vente de tous les types d’unités, dans l’ensemble des marchés canadiens et particulièrement aux environs de Montréal.
La faible disponibilité des demeures et les taux d’intérêt avantageux pourraient continuer à exercer une pression à la hausse sur le coût des maisons au moins jusqu’en 2022. Les premiers acheteurs pourraient avoir plus de difficultés à accéder à la propriété pour encore un moment.
Cette tendance a fait apparaître des comportements qui ne sont pas souhaitables. Effectivement, nous avons vu un grand nombre d’acheteurs renoncer à des inspections préachat et aux garanties légales. Certains clients ont fait des offres d’achat sans même avoir visité les résidences.
Les émotions prennent parfois le dessus lorsqu’il s’agit d’achats aussi importants que celui d'un bien immobilier, et on peut comprendre les gens d’agir impulsivement quand ils ont un coup de cœur. Ce manque de rationalité peut cependant donner lieu à de potentiels regrets quant au choix de la propriété, du quartier ou d’autres éléments.
L’achat d’une propriété se prépare. Les clients ont tout avantage à requérir les services de professionnels pour faire leur budget, obtenir une préautorisation hypothécaire et prévoir l’ensemble des coûts liés à un achat immobilier, entre autres les taxes, les travaux, les frais de notaire et les coûts de déménagement.
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3. La reprise de l’immigration pourrait accentuer la demande pour le locatif
La demande immobilière est soutenue par la croissance démographique, qui elle-même provient en grande partie de l’immigration. Pourtant, la diminution de l’immigration en 2020 n'a pas fait baisser les prix des propriétés ni réduit le volume des ventes.
Un nouvel arrivant devient presque toujours locataire à son arrivée au Canada. Ce n’est qu’après quelques années qu’il entame les démarches pour acquérir une propriété. La reprise attendue de l’immigration en 2022, avec de nouvelles cibles annoncées par le gouvernement fédéral, aura donc bel et bien un effet sur la demande locative à court et moyen terme, et non sur l’achat et la vente de résidences, qui se verra plutôt à long terme.
Même si la mise en chantier de logements locatifs a atteint un sommet en 2020 et qu’elle devrait demeurer élevée d’ici 2023, il est à craindre que les loyers restent dispendieux dans les grands centres.
4. Les condos devraient rester populaires
La pandémie a rendu plus populaires certains modes de vie. En raison du télétravail, beaucoup de ménages ont redécouvert le plaisir d’avoir un grand terrain ou un accès à l’eau ou à la montagne. Certains se sont demandé si le marché des condos allait en pâtir.
Je crois que non. Ce type d’habitation répond à des besoins spécifiques de certaines clientèles précises, à savoir les jeunes professionnels urbains, les étudiants ayant un soutien financier et les investisseurs immobiliers, entre autres. Les condos pourraient aussi rester populaires auprès de la tranche des premiers acheteurs qui, souvent, ne peuvent se porter acquéreurs d’une maison unifamiliale, surtout dans les grands centres urbains où les prix sont particulièrement élevés.
Au Québec par exemple, nous avons vu le nombre de transactions augmenter plus rapidement pour les condos que les unifamiliales dans les derniers mois. Certains condos qui étaient utilisés pour de la location à court terme ont été remis en vente, les propriétaires voyant une occasion d’obtenir un bon prix pour un actif en dormance en raison de la crise sanitaire.
5. Les taux hypothécaires pourraient augmenter
Prédire la direction des taux hypothécaires est toujours hasardeux, car ceux-ci sont soumis aux forces du marché et à l’état de l’économie de manière générale. Nous avons toutefois de bonnes raisons de penser que les taux d’intérêt, qui demeurent très bas malgré de récentes hausses, devraient remonter graduellement d’ici un an.
La Banque du Canada surveille étroitement le niveau actuel de l’inflation qui est en tendance haussière après plus d’un an et demi de crise. Dans une annonce récente2, elle a toutefois fait savoir que le taux directeur devrait demeurer inchangé au moins jusqu’à la deuxième moitié de 2022, afin de permettre une reprise économique solide.
Cela ne veut pas dire que les emprunteurs doivent nécessairement négocier des prêts hypothécaires à taux fixe sur un terme de 5 ans. Le choix d’une solution de financement à taux fixe ou variable doit tenir compte des besoins et préférences des emprunteurs, notamment leur tolérance face aux fluctuations des taux, leur capacité à faire face à une hausse de leurs versements ainsi que leurs projets à court, moyen et long terme.
En bref, l’achat d’une propriété reste un choix chargé d’émotions et un moment important dans la vie d’un individu ou d’une famille. La pandémie a certes accentué certains phénomènes et provoqué une effervescence sur le plan des transactions, mais, selon mes observations, les marchés pourraient se stabiliser au cours des douze prochains mois.
1 Statistiques nationales : Le marché de l’habitation continue de se modérer en juin, 15 juillet 2021