La plupart des risques géographiques sont aussi rares que dévastateurs pour l'immobilier. Mais d’autres, en revanche, ont beaucoup plus de chance de se produire. Faire intervenir un expert peut donc s’avérer judicieux et financièrement rentable : compte tenu de l’investissement que représentent l’achat d’un terrain et la construction d’une habitation, le coût d’une évaluation en bonne et due forme reste la plupart du temps raisonnable. Voici 6 risques, plus ou moins courants, que vous devriez surveiller et faire mesurer avant de signer votre acte d’achat.
1. Sols argileux : attention danger!
Cette carte géologique représente 45 glissements de terrain survenus au Canada entre 1840 et 2006. Si les glissements de terrain peuvent être observés dans toutes les régions du Canada, les zones les plus exposées sont celles où l’on trouve des argiles glacio-lacustres (violet) et glacio-marins (bleu nuit). (Crédit : Ressources Naturelles Canada)
Le 10 mai 2010, une maison située en bordure de la rivière Salvail à Saint-Jude s’est effondrée. Le sol argileux venait de céder sous elle. Un phénomène qui se produit lorsque le terrain devient trop sec... Au Québec, tous les glissements de terrain ne se soldent heureusement pas par de tels drames humains et immobiliers. Mais ils ne sont pas rares et restent toujours dangereux! Le risque est d’autant plus important que les sols argileux se trouvent dans les parties les plus habitées du territoire, notamment dans la vallée du Saint-Laurent, la vallée de l’Outaouais et la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Construire une maison sur un sol argileux n’est pas interdit, mais ce choix requiert des précautions. « Il est fortement recommandé de faire réaliser une étude sur la capacité portante du terrain et la stabilité du talus avant tout achat », explique Nadège Tollari, géologue et vice-présidente de Multitest, une entreprise d’inspection des sols. Le but : « savoir quelle maison pourra être construite à cet endroit et quelles précautions devront être prises ». « Les fissures dans le sol, près du sommet ou dans les talus, sont les principaux signes précurseurs de glissements de terrain », prévient de son côté la Sécurité civile. Pour en avoir le cœur net, il faut compter de 3000 à 5000$, soit le prix d’une étude de capacité portante. La facture peut néanmoins grimper si le site est compliqué à tester, ou s’il est éloigné et nécessite des déplacements. « Si le terrain a connu une occupation industrielle dans le passé, il pourrait également être utile de réaliser un test de sol pour vérifier s’il n’a pas été contaminé par un déversement d’hydrocarbures, d’huile de chauffage ou autre. L’analyse coûte entre 1000$ à 2000 $», ajoute Nadège Tollari.
2. Le piège des zones inondables
Cette carte de l’impact des changements climatiques sur les régions fluviales fait écho à celle des zones inondables. Les effets les plus directs et dangereux de ces changements (en violet hachuré) sont en effet l’augmentation de la fréquence des inondations et l’intensification de l’érosion fluviale. Comme on peut le voir, le très peuplé bassin du Saint-Laurent est particulièrement exposé à ces risques environnementaux (Crédit : Ressources Naturelles Canada)
Les habitants du bord de la rivière Richelieu savaient que le privilège de se lever tous les jours avec cette belle vue représentait un risque d’inondation. Mais il leur semblait alors très loin. En 2011, cette épée de Damoclès leur est pourtant tombée dessus sous la forme d’une crue historique : par la faute d’un cocktail météo dévastateur et d’un mauvais aménagement des berges, la rivière déborda dans des proportions jamais vues jusqu’alors. C’est un fait : les inondations peuvent se produire à intervalles très longs. Ça ne veut pas dire qu’elles ne se produisent jamais. « Un événement qui présente une récurrence de 20 ans ou de 100 ans peut être considéré comme rare, mais il est prédictible statistiquement, prévient le site du ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. On sait que l’événement va se produire tôt ou tard, mais on ignore quand exactement ». Vérifier que le terrain convoité se situe dans une zone inondable est d’autant plus important que les assurances ne couvrent généralement pas ce risque. « On peut être hors la loi sans même le savoir! prévient Audrey Ouellet, ingénieur spécialisé dans le domaine hydrique et propriétaire d’ALPG Consultants inc. Il est interdit de construire dans un cours d’eau et sur la bande riveraine, une zone de 10 à 15 m à partir de la ligne des hautes eaux selon la topographie, partout au Québec. Parfois, un petit cours d’eau intermittent existe sur le terrain mais on ne s’en aperçoit pas ». Le fait d’être proche d’un cours d’eau présente des risques d’inondation mais aussi de perte de terrain à cause de l’érosion. Ce détail qui n’en est pas un peut être vérifié en mesurant la taille réelle du terrain et en le comparant avec le certificat de localisation. Si vous constatez une différence, prenez garde. « Il faut aussi vérifier que le terrain ne se situe pas dans un milieu humide, poursuit l’experte. Ça pourrait signifier, dans certains cas, que le sol est saturé d'eau, que le niveau de l'eau souterraine est haut, ce qui causerait des problèmes d’accumulation et d'infiltration d'eau. Les signes qui ne trompent pas? Un sol spongieux, de la terre noire, de la mousse, des arbres morts, etc. ». Avec l’urbanisation croissante, les terrains qui restent libres sont souvent bas et situés en milieu humide (traditionnellement les habitants investissent d’abord les points les plus hauts de la topographie). Audrey Ouellet conseille donc aux futurs acheteurs d'immobilier de se renseigner auprès de leur ville et de leur MRC (consultation des cartes utiles et de la réglementation). Pour savoir où se trouvent les milieux humides au Québec, vous pouvez aussi regarder cette carte. À noter qu’il est aussi possible d’engager les services d’une firme experte dans le domaine. Pour un prix entre 800$ et 1200 $, elle réalisera les recherches préliminaires sur les documentations existantes.
3. Tornades : un risque non négligeable
Cette localisation des tornades survenues au Canada ces 30 dernières années permet d’identifier deux zones d’activité principales : les Prairies et le couloir québéco-ontarien s’étendant de la région des Grands Lacs jusqu’à Sherbrooke. (Crédit : Environnement Canada).
Le saviez-vous? Le Canada est le pays où se produit le plus grand nombre de tornades après les États-Unis. Or, ces colonnes rotatives de vents violents peuvent détruire des habitations en un temps record. Une soixantaine de tornades ont lieu chaque année au Canada, principalement en Saskatchewan, au Manitoba, en Alberta en Ontario, en Colombie-Britannique et au Nouveau Brunswick. Le risque est plus faible au Québec, où les tornades sont généralement moins fortes qu’aux États-Unis ou dans le reste du Canada, et il existe principalement dans le sud. Les tornades se produisent en plus grand nombre en juin et juillet. Difficile hélas de se prémunir contre le risque de tornade. À part s’établir hors des zones à risque bien sûr….
4. Feux de forêts : un risque en augmentation
Voilà une carte qui devrait rassurer la plupart d’entre vous : la majeure partie des incendies se déclarent loin des principales zones d’habitation. Cependant, le désastre de Fort McMurray doit nous rappeler que dans un pays aussi boisé que le nôtre, ce risque est bien réel (Crédit : Ressources Naturel Canada).
Parmi les catastrophes naturelles d’envergure, il ne faut pas non plus négliger le risque de feu de forêt qui pourrait venir détruire votre habitation si elle située en forêt ou en lisière de bois comme c’est souvent le cas des chalets notamment. Il faut savoir que plus de 7000 feux de forêt éclatent chaque année au Canada. L’incendie de Fort McMurray au printemps 2016 a notamment marqué les esprits. Dans ce cas, 80 % des habitations du quartier Beacon Hill de Wood Buffalo ont été détruites par le feu. Là encore, impossible d’éviter totalement ce risque sauf en s’éloignant des forêts (ce qui n’est jamais facile au Canada). Et il va falloir s’y habituer : en raison du réchauffement climatique, le risque d’incendies devrait considérablement augmenter dans les années à venir. Cette petite animation est sans équivoque à ce sujet…
5. Le risque sismique au Canada : fantasme ou réalité?
L’activité sismique canadienne se répartie autour de deux grandes zones : au large de la côte Ouest et autour du densément peuplé axe du Saint-Laurent sur la côte Est. (Crédit : Ressources Naturel Canada)
C’est une réalité peu connue des Canadiens : en moyenne, tous les ans, quatre séismes dépassent la magnitude 4 dans l’Est du Canada. S’il y a beaucoup de séismes au large de la côte Ouest, la grande majorité de ceux qui se produisent dans les terres surviennent à l’Est. C’est particulièrement vrai dans le nord-est et le sud de l’Ontario, dans la région des Grands Lacs, l’ouest du Québec (dont Montréal et Hull), dans le Charlevoix-Kamouraska, le Bas-Saint-Laurent, au Nouveau-Brunswick et jusqu’en Nouvelle-Angleterre.v Une activité sismique que les experts peinent à expliquer : le Canada ne se trouvant pas en bordure de deux plaques tectoniques, les tremblements de terre devraient être rarissimes. Ils sont pourtant bien réels : on estime entre 5% et 15% le risque qu’un séisme d’une magnitude de 7,1 touche le Québec dans les 50 prochaines années. Pourtant, dans la Province, « moins de 5 % des particuliers ont souscrit un avenant contre les tremblements de terre et à peine plus de 40 % des entreprises sont protégées », s’étonne Pierre Babinsky, directeur des communications et des affaires publiques du Bureau d’assurance du Canada interviewé par la Chambre de l’Assurance de Dommages. Ne dramatisons pas : ces événements ont généralement peu de conséquences néfastes. Mais ils pourraient localement et ponctuellement causer des dommages dont des destructions d’habitations, des incendies ou des inondations.
6. Radon : faites le test!
Si aucune région canadienne n’est protégée du radon et de ses conséquences, cette carte permet d’identifier en un coup d’œil les zones les plus à risques : le sud du Manitoba et du Saskatchewan, mais aussi la Gaspésie et le nord du Nouveau-Brunswick. (Crédit : Radon Environmental Management Corp).
Près de 7% des Canadiens vivent dans une maison dont les émanations de gaz radon sont supérieures aux normales (200 Bq/m3). Or, inhaler des doses excessives de radon peut causer des cancers du poumon. « Après le tabagisme, le radon est la principale cause du cancer du poumon, le cancer le plus meurtrier au pays », rappelle la Société canadienne du cancer. Les émanations de radon, un gaz d’origine naturelle, sont plus fréquentes au Manitoba, au Nouveau-Brunswick, en Saskatchewan et au Yukon mais aucun endroit au Canada n’en est exempt. Comme ce gaz est inodore et incolore, on ne peut le percevoir facilement. Il est d’autant plus conseillé de faire un test, que celui-ci est généralement peu coûteux. Vous pouvez trouver un professionnel agréé pour le réaliser en cliquant ici. Il est également possible de réaliser le test soi-même. Plusieurs types de détecteurs existent sur le marché à des prix variant entre environ 15$ et 150$ (sommes auxquelles il faut souvent ajouter le prix des analyses et d’éventuels frais d’expédition). L’Association pulmonaire du Québec offre la possibilité d’acheter un dosimètre en ligne pour 45$ avec un coût supplémentaire de 7$ pour l’envoi des tests dans un laboratoire situé aux États-Unis. Santé Canada considère qu’il faut recueillir des données pendant au moins trois mois et de préférence en hiver afin d’avoir un portrait fiable car les mesures varient beaucoup en fonction du temps. Dans le cas où le test révélerait des taux importants de radon, des mesures simples et coûtant entre 800 et 3 000$ peuvent être réalisées pour ventiler l’espace ou/et diriger le gaz vers l’extérieur.